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Les vendeurs de rue du monde entier – moteurs économiques de nos villes – continuent à se battre pour les rues, avec peu d’accès aux mesures de relance après la Covid-19

Pour comprendre l’impact de la pandémie sur les vendeurs de rue du monde entier, plus de 600 articles de presse internationaux, nationaux et locaux, publiés entre juillet 2020 et novembre 2021, ont été analysés. Malgré le fait que dans certains endroits, les vendeurs de rue étaient reconnus comme des prestataires de services essentiels, ils ont continué à subir des harcèlements sous forme de violence, d’expulsions et de politiques répressives qui ont laissé beaucoup d’entre eux dans l’incapacité de gagner leur vie. Toutefois, organisés en syndicats, coopératives ou associations, les vendeurs de rue ont réalisé des changements politiques remarquables visant à améliorer leur intégration dans les villes.

L’effet des mesures de prévention contre la Covid-19 sur les vendeurs de rue


À la mi-2020, il est devenu clair que la pandémie avait amplifié les inégalités socio-économiques auxquelles étaient déjà confrontés les vendeurs de rue auparavant. Privés de leur revenu quotidien et n’ayant pas d’argent pour se nourrir, ces travailleurs n’avaient aucun filet de sécurité sur lequel s’appuyer, de plus que leurs avoirs et leurs économies ont été épuisés. Selon les médias, à New York, près de 20 000 vendeurs de rue ont perdu 70 à 90 % de leurs revenus.

Au Zimbabwe, les reportages de Harare ont montré à quel point les vendeurs de rue craignaient de mourir de faim plus que de la COVID-19. Les vendeurs de rue au Cambodge partageaient les mêmes inquiétudes. Dans les villes aux alentours de Mexico, les vendeurs de rue d’un marché religieux populaire ont connu une baisse de 70 % de leurs ventes par rapport aux années précédentes, tout en faisant face à une augmentation des coûts d’achat de désinfectants.

Une fois que des mesures de confinement strictes ont été mises en place, de nombreux emplois formels et informels ont été perdus, de sorte que de nombreuses personnes se sont tournées vers la vente ambulante pour gagner leur vie. Une augmentation du nombre de vendeurs de rue a été signalée par rapport aux niveaux pré-covid. En décembre 2020, il y avait une augmentation du nombre de vendeurs de rue à New York, dans l’un des quartiers de New York les plus touchés par la COVID-19, la majorité d’entre eux étant des migrants sans statut légal. En juin 2020, à Baja California Sur México, le directeur de la chambre de commerce de la ville a signalé une augmentation de 25 % des vendeurs dans la ville. D’autres rapports parlent de la situation similaire en Argentine et dans d’autres villes du Mexique où au Brésil, où une augmentation de 30 % de la vente dans la rue a été signalée.

Il y a eu toutefois une certaine reconnaissance du rôle clé que jouent les vendeurs de rue dans la reprise économique. Le Premier ministre chinois, Li Keqiang, a fait l’éloge des vendeurs de rue qui, selon lui, ont permis la création de 100 000 emplois dans une grande métropole du sud-ouest alors que le pays faisait face à une explosion du chômage. Pourtant, ils continuent de faire face à l’hostilité de la police, du public et des médias.

En décembre 2020, plus de 2000 vendeurs de rue new-yorkais ont reçu un don de 1000 dollars de la part de la Fondation Morgan Stanley « en raison du rôle que jouent les vendeurs de rue dans la vie quotidienne de la communauté ».

En décembre 2021, la cuisine de rue de Singapour a été inscrite sur la liste du patrimoine mondial de l’Unesco. Cette décision n’aurait pas pu tomber à un meilleur moment pour les vendeurs, offrant une protection inestimable après une année précaire.

Une bataille pour les rues

Les organisations de vendeurs de rue ont travaillé dur pendant la pandémie pour faire reconnaître par les autorités leur rôle essentiel dans la société, avec des résultats mitigés. En septembre 2020, les vendeurs de rue en Namibie se sont demandés pourquoi, après avoir assuré le respect des directives de santé et de sécurité, les gouvernements locaux n’ont pas réussi à voir que les ventes dans les rues donnaient un coup de pouce aux économies locales. Avec la réouverture des entreprises formelles, les vendeurs de rue ont également demandé la reprise de leurs activités. En décembre 2020, des vendeurs de rue du centre historique de Mexico ont défié les mesures de confinement en travaillant, au risque de se voir infliger des amendes et des confiscations. En février 2021, les vendeurs de rue du Lesotho ont poursuivi le gouvernement en justice pour l’interdiction de la vente de rue pendant le confinement. En juillet 2021, des vendeurs de rue à Delhi, en Inde, ont organisé des manifestations pour exiger la réouverture des marchés hebdomadaires.

En janvier 2021, le Street Vendor Project (Projet des vendeurs de rue) a mené la campagne sous le slogan de « Lifting the Permit Cap » (Lever le plafond des permis) pour plaider en faveur d’un soutien aux vendeurs de rue à New York pour une reprise plus juste à un moment où un vote serait adopté sur un nouveau projet de loi qui rendrait éligibles les vendeurs informels à une aide financière. Le Conseil municipal de New York a voté pour approuver le projet de loi, dite Intro. 1116-B, qui prévoit la création de 4 000 nouveaux permis pour les vendeurs de rue dans la ville au cours de la prochaine décennie, et l’établissement d’une unité d’application de la loi distincte pour superviser la communauté des vendeurs de rue.

Harcèlement et mesures punitives

Du Mexique à l’Inde, du Ghana à l’Argentine et du Pérou au Malawi, les politiques urbaines répressives se sont amplifiées pendant la pandémie. À Harare, au Zimbabwe, le 18 avril 2020, des vendeurs de rue ont été expulsés et leurs étals détruits dans le cadre d’une campagne visant à « dépolluer la ville ». En janvier 2021 au Malawi, où les chiffres officiels évaluent à plus de 200 000 le nombre de vendeurs de rue informels à l’échelle nationale, la bataille pour les rues, pour le droit au travail est un combat quotidien. En avril 2021, les vendeurs ambulants d’Accra ont reçu un ultimatum de deux semaines pour déménager dans des marchés désignés. En juillet 2021, à Oaxaca, au Mexique, 1 500 étals de vente ont été retirés du centre historique de la ville lors d’une opération de répression policière après que les propriétaires d’entreprises aient envoyé une demande au président mexicain demandant leur officialisation. En août 2021, des violences ont éclaté au Pérou lors d’une opération policière visant à expulser les vendeurs ambulants des rues. En septembre 2021, sous la bannière de la récupération du sentier pour les piétons, la police de Kolkata a expulsé les colporteurs de la rue Kalakar. À Parana, en Argentine, la tension monte alors que les vendeurs font face à des expulsions.

En octobre 2020, des politiques punitives en matière d’espace public ont été présentées en Colombie, où une loi nationale sur les vendeurs de rue obligerait ces derniers à payer pour utiliser l’espace public. En novembre 2020, des vendeurs de rue mexicains sont descendus dans la rue pour demander l’autorisation de travailler à l’approche des fêtes de fin d’année. En juillet 2021, au Mexique, les vendeurs de rue Xalapa ont manifesté pour demander le droit au travail. En juin 2020, les vendeurs de rue péruviens ont tout risqué dans les rues pendant le confinement pour gagner leur vie. Au Brésil, en mai 2021, des vendeurs de rue ont manifesté contre le projet de la mairie de Rio visant à retirer les vendeurs de rue du centre-ville.

Aux États-Unis, en août 2021, les vendeurs de rue de Corona Plaza dans le Queens ont commencé à s’autogérer pendant la COVID-19. Leur exemple a montré comment les espaces publics pourraient prospérer si les politiques de vente de rue étaient plus favorables et moins contradictoires.

Pendant la crise de la COVID-19, les vendeurs de rue ont démontré leur rôle important dans la sécurité alimentaire de nos villes en nourrissant les autres pour se nourrir eux-mêmes.

Les vendeurs de rue immigrés étaient particulièrement vulnérables pendant la période de covid. À New York, par exemple, les vendeurs de rue immigrés sont confrontés à de lourdes amendes pour avoir effectué un travail non autorisé, car les vendeurs de rue de New York font face à une augmentation des amendes après une pause en 2020. Pourtant, en septembre 2021, lorsque les produits frais d’un vendeur de rue – un immigrant – ont été jetés par les autorités municipales de NYC Bronx, cela a mis en évidence la façon dont les politiques urbaines punitives des villes continuent d’ignorer leur importance et de s’attaquer brutalement à leurs moyens de subsistance. Les protestations des organisations de vendeurs de rue et la couverture médiatique nationale ont incité le maire de New York à promettre des changements à la législation existante.

En Inde, en septembre 2020, des marchands ambulants migrants restés à Telangana peinaient à gagner leur vie : « Nous pouvons rentrer chez nous, mais que faisons-nous là-bas ? Il n’y a pas de travail, et même si nous obtenons quelque chose, ils nous paieront très peu. Nous pensions que les choses reviendraient à la normale, mais cela n’a pas eu lieu », a déclaré un colporteur.

En février 2021, en Argentine, Agustina Mayansky de l’UTEP-MTE a été arrêtée alors qu’elle manifestait et défendait le droit au travail des travailleurs migrants sénégalais.

En juin 2021, en Espagne, des chaussures de sport conçues par des migrants ont donné des coups de pied contre le système. Créée par des migrants, l’Union des vendeurs de rue de Barcelone a lancé sa propre marque de baskets via l’entreprise de vêtements Top Manta – créée en 2017 par l’union – où travaillent principalement des Africains subsahariens. L’entreprise affirme que les bénéfices aideront les vendeurs migrants à « devenir légaux et à travailler pour un salaire décent ».

En octobre 2020, en Afrique du Sud, les vendeurs de rue migrants auraient été moins bien lotis après le confinement. À Durban, les vendeurs de rue migrants ont eu du mal à se remettre des retombées économiques de la pandémie alors qu’ils étaient confrontés à la bureaucratie municipale et à une police hostile. En mars et avril 2021, des témoignages d’hostilité auxquels ils sont confrontés ont émergé lorsque trois vendeurs de rue ont vu leurs marchandises pillées et incendiées lundi matin dans le CBD de Durban, et deux hommes ont été hospitalisés avec des blessures graves. Les vendeurs de rue étrangers de Durban ont été « avertis » de ne pas retourner travailler : « C’est ma seule source de revenu, pourtant, nous ne pouvons pas travailler légalement en tant que vendeurs dans les rues et y retourner parce que nous sommes poursuivis ou menacés, […] si nous essayons d’y revenir, ils prendront nos biens comme avant et siffleront pour que la foule nous attaque. Que devons-nous faire ? », a demandé Mubayua, un vendeur de rue immigré.

Inclure les vendeurs de rue dans les plans de relance de la ville

En Inde, en octobre 2020, le ministère fédéral du Logement et des Affaires urbaines (MoHUA) s’est associé à Swiggy – une plate-forme de livraison de nourriture – pour mettre en ligne les vendeurs de nourriture de rue à Delhi, Chennai, Ahmedabad, Varanasi et Indore. Plus tard, il a été rapporté que Swiggy allait intégrer 36 000 vendeurs de rue dans le cadre du programme PM SVANidhi. En janvier 2021, les vendeurs de rue de la ville d’Hyderabad – dans le cadre de la campagne « Main Bhi Digital » – s’attendaient à pouvoir s’associer à des applications de livraison de nourriture telles que Zomato, Swiggy et Uber Eats pour améliorer leur marché. Dans la ville, un total de 1 45 090 vendeurs de rue ont été recensés et des cartes d’identité, indispensables pour accéder au dispositif, ont été délivrées à 1 34 384 d’entre eux. En septembre 2021, une campagne de paiement numérique a été lancée dans le cadre du programme PM SVANidhi. « Il couvrira 223 villes à travers le pays avec environ 8 68 184 vendeurs de rue. Il vise à permettre l’inclusion des vendeurs de rue dans l’écosystème de crédit formel et à favoriser l’inclusion financière ».

En juillet 2021 en Argentine, le gouverneur Juan Manzur a rencontré les dirigeants des syndicats de vendeurs de journaux et de magazines, ainsi que des syndicats de vendeurs de rue et de taxis pour annoncer qu’un quota de logements serait alloué aux travailleurs de l’économie informelle, qui comprendrait 3 600 nouvelles maisons.

Le maire de Santiago au Chili a lancé une initiative proactive de formalisation municipale pour délivrer plus d’un millier de nouveaux permis aux vendeurs de rue, déclarant que l’idée de donner des permis aux vendeurs de rue était la formalisation d’une activité qui existe déjà.

En octobre 2021, les travailleurs de l’UTEP ont demandé à discuter des politiques de protection de leur travail et de formalisation en Argentine. À New York, en septembre 2021, après l’incident avec le vendeur de fruits immigré dans le Bronx dont les marchandises ont été confisquées, les vendeurs de rue ont exigé une voie pour formaliser leur travail.

Les articles analysés pour ce document ont été publiés entre le 1er juillet 2020 et le 9 novembre 2021. Notre objectif est de fournir des informations pour mieux informer les actions locales et nationales, la solidarité mondiale pour les vendeurs de rue et une meilleure élaboration des politiques pour garantir que les villes du futur soient des villes pour tous.

Lire la première et la deuxième partie de cette série ici :

  1. Où sont les villes inclusives ? Les vendeurs de rue font face à une hostilité croissante dans le monde entier
  2. Pour les vendeurs de rue du monde entier, la vie ne sera peut-être plus jamais la même après la COVID-19

By Pilar Balbuena

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